lundi 25 mai 2015

Caché dans la maison des fous, Didier Daeninckx



L’histoire : 1943, asile de fous de Saint-Alban en Lozère. Deux psychiatres organisent la résistance à l’embrigadement des fous et à leur négation. L’un, Tosquelles, a fui l’Espagne franquiste ; l’autre, Bonnafé, communiste, est un ami des surréalistes. Ils cachent les résistants blessés de la région. Ils y accueillent une jeune fille juive résistante, Denise Glaser, en même temps que le poète Paul Éluard et sa compagne Nusch. Éluard y passe huit mois, avec cette double menace de l’enfermement des êtres et de l’enfermement du monde dans la barbarie, cette double résistance à la normalité et à la folie. Dans cet hôpital, où l’on favorise le surgissement de ce que l’on nommera plus tard l’art brut, le poète-résistant découvre, sous le regard fasciné de Denise, comment la parole des « fous » garantit la parole des poètes. Une plongée vertigineuse à laquelle nous convie Didier Daeninckx.

Extrait :
« Elle s’était levée au moment où l’ambulance Ford manoeuvrait pour se garer sur la place, le faisceau des phares balayant la façade de grès. Elle était montée sur un banc pour apercevoir le médecin et le photographe qui se dirigeaient vers l’arrière du véhicule, leurs pas imprimés dans le tapis blanc qui déjà recouvrait le gravier. Une jeune femme en était sortie la première, le visage encadré par une épaisse chevelure noire, enveloppée dans une ample cape, puis un homme vêtu d’un pardessus croisé, les traits obscurcis par l’ombre portée de son chapeau, était apparu. Il s’était légèrement incliné pour allumer une cigarette, et la flamme vacillante avait éclairé un regard curieux, presque inquiet, celui que l’on promène sur ces endroits inconnus où l’on arrive sans les avoir choisis. »

Collection  Sur le Fil dirigée par Murielle Szac
Des romans où le destin d’un poète croise la grande Histoire

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